Faguo-ren à Huaguo

Après de longs mois d’absence sur le blog, on ne sait plus vraiment par où reprendre.
Peut-être nous lancerons nous dans des sujets variés de notre vie Chinoise, notre bourlingue de tous les jours. Des récits toujours très subjectifs, descriptifs pour encore une fois faire partager notre vie et surtout poser nos souvenirs sur cet autre monde, cette société aux antipodes de la nôtre, ce pays parfois irritant, souvent surprenant qui évolue à toute vitesse et de façon si hétérogène.
On tentera aussi d’agrémenter nos récits de nos escapades. Il y a Hong-Kong que l’on visite assez régulièrement pour s’échapper un peu et voir des copains, et puis Shenzhen pour escalader et s’échapper aussi… En fait, on aime bien s’échapper, pas pour fuir mais se changer les idées et souffler un peu. Elle fatigue cette Chine. Notre Chine, celle de HuaGuo.
Guangzhou pour ses mets qui nous délectent, ou XiChong pour aller voir la mer,  faire un peu de surf voire même du parapente. Et puis les Philippines pour fêter le Nouvel An chinois, et bientôt Bangkok pour revoir les copains, et tant d’autres endroits encore à découvrir.

Mais maintenant que Brice a réussi son examen au permis de conduire chinois, la voie est libre.On va pouvoir aller partout ! À nous les routes, les Chinois qui ne regardent QUE devant et jamais derrière ou sur les côtés, qui roulent en pleins phares et le nez dans le téléphone !
Une belle et nouvelle aventure s’ouvre à nous.

En attendant ces vadrouilles, bourlinguesques pour certaines, on bosse et on profite du confort d’avoir un chez soi, une maison qu’on installe à notre gout autant que faire se peut.
On trouve pas tout ce qu’on veut, et c’est pas facile de faire comprendre à des ouvriers qu’on voudrait « un peu mieux » quand chabuduo leur suffit, alors on s’en contente, ou alors on cherche a se débrouiller par nous-mêmes… mais là, ça peut prendre du temps…

Voici un petit aperçu. C’est donc ici qu’on habite.– L’article a commencé à être écrit il y a plusieurs mois.
Aujourd’hui, il commencerait par « la saison des pluies s’est installée… ».
Mais on ne va pas se formaliser. De toute façon il n’y a que deux saisons ici.
C’est juste qu’on connaît un peu mieux maintenant !

Reprenons donc et racontons finalement.
« La saison des pluies est terminée depuis peu ». Les températures baissent doucement et la moiteur de l’été disparaît au profit d’une météo douce et accueillante (c’était en Septembre).
C’est dans ces conditions qu’on s’installe dans notre maison, dans cette campagne qui devient la nôtre également.

Alors que les journées de travail défilent, les week-ends sont propices aux escapades.

On s’est acheté des VTT ! Et ouais ! Ils sont fabriqués dans le bas du village-usine (surtout ne pas s’attendre à du bucolique), ce qui permet d’aller visiter l’usine, de choisir la couleur du cadre et de faire régler les freins. Bref, on fait fonctionner l’économie locale et on rencontre les voisins. Bien installés sur nos biclous, on part sur les chemins pentus et accidentés des montagnes qui nous entourent. On suit la route qu’on appelle « du potager », on essaye le chemin à droite du réservoir et puis le chemin à gauche de la petite cabane, on traverse les vergers. On passe au dessus du pont. De l’autre pont et on prend la route du coin. On se fabrique notre carte, nos raccourcis et nos repères.

Il y a le chemin de « tout là-haut » et celui « du bout ». Celui « du chien qui sourit » et celui « des abeilles ».

En ce moment, c’est la saison du miel. Le village bourdonne et butine. Des nomades ont installés leurs campements de fortune et posés des ruches, par dizaines, le long des chemins, sous les arbres, autour des maisons. Le voisin a d’ailleurs ses ruches, qu’il bichonne. Sans gants, sans chapeau ni protection, c’est tout naturellement qu’il soulève le toit de la ruche, entouré de centaines d’abeilles bourdonnantes dérangées en plein labeur. Et hop, il bouge les casiers, réorganise et déplace tout ce petit monde. Tranquille ! Ici, on a donc du miel du village de Huaguo (= fleurs-fruits dans la traduction).

Les poules se baladent allègrement, les canards et les oies barbotent dans la mare ou la boue du ruisseau, les oiseaux chantent, les papillons volent, les chiens baillent et siestent à l’ombre. Pour nous, elle est peinarde cette vie locale et rurale.

Au départ, les gens nous regardaient dubitativement. Et lorsqu’un paysan nous voyant passer nous interrogeait d’un mais, qu’est-ce-que tu fais là ? et Brice de répondre, je rentre à la maison, ses yeux se débridaient en deux billes noir et rondes, Rhooooo, Hui jia ?
Étonné qu’il fût notre paysan ne sachant pas s’il n’avait pas mal compris notre chinois rudimentaire.

Maintenant, les locaux nous reconnaissent et nous saluent… enfin presque tous.
À travers certains, on se rend compte du regard méfiant que quelques un peuvent avoir envers les désormais immigrés que nous sommes.
On est encore loin de pouvoir converser avec nos voisins. Les autochtones parlent un dialecte, ne comprennent pas toujours le mandarin et on prononce différemment les mots.

Exemple :
Le nom du village est HuaGuo – à prononcer RouaGouO.
La France, se dit FaGuo – à prononcer FaGouO.
Mais ici, le H se prononce F. Donc on habite à FouaGouO

D’où les quelques difficultés de compréhension…
(On se dit qu’on fera un post sur l’apprentissage du chinois – nous on apprend le mandarin… puisque c’est la langue dite commune, mais ici, on parle plutôt hakka ou cantonnais)
Et bien entendu, mis à part rOK ou rHello, personne ne parle anglais.

Voilà, donc on s’installe dans cette campagne éloignée et riche en nouveautés. On profite du calme, du silence, de la nature, de l’air qui ne semble pas trop pollué et de l’eau qui vient de la montagne de derrière (bon, on la fait bouillir tout de même).

On vit au rythme des cultures, des légumes qui poussent, se font arroser et couper et fagoter pour être vendus au marché du coin, des tracteurs qui font teuf teuf teuf, du vendeur de viande ambulant qui klaxonne sur son triporteur pour signaler son arrivée au village, des hirondelles qui dansent (là, on est au printemps), des grenouilles qui chantent tellement fort, sans oublier les punaises qui puent lorsqu’elles se font écrasées ou tout autres insectes plus colorés et nouveaux pour nous.

Et puis le village « des fleurs et des fruits », c’est plus petit que tous les villages. Il doit y avoir une toute petite dizaine de foyers, nous sommes au bout du bout d’une route (fraichement bétonnée). Bon, les habitations sont loin d’être jolies et mignonnes. Le fonctionnel prévaut sur l’efficace, l’ergonomique et l’élégant.
Quelques vieilles bâtisses demeurent. Les murs aux enduits ocre délavés et jaunâtres qui s’effritent. Seuls les puissants chambranles en granit des portes restent debout, preuve qu’à une autre époque existaient des techniques locales, remplacées depuis par la brique creuse bon marché et les petits carreaux de céramique symboles du développement uniforme de la Chine post révolutionnaire. Mais on se contente de ces vestiges d’un temps oublié. L’humidité ambiante apporte la mousse et cette couleur si particulière et fraîche.
Les vielles écritures que le temps a partiellement effacé et qui racontent des messages de la Révolution Culturelle, les montants en bois des fenêtres et les portes sculptées, les puits de lumière et d’eau, et les restes de quelques encens et pétards dont l’emballage de papier rouge est éparpillé au sol glissant d’une pierre longtemps polie.

Si on reprend ce texte aujourd’hui, la saison des pluies est revenue.
Des nuages remplis d’eau se vident presque tous les jours et subrepticement, faisant gonfler les cours d’eau du coin. Tout est très vite très mouillé. Mais lorsque que le soleil apparaît, la lumière est pleine de contraste et de profondeur.
Le vert de la végétation brille et le camaïeu émeraude de la nature est superbe.

Les arbres sont pleins de lychees roses, dont la saveur est complément différente de nos lychees « européens ». Il y a les papayes, les bananes, les jackfruits et les longyang. On se régale de pastèques et de fruits du dragon.

Côté boulot, c’est un nouveau rythme et challenge un peu stressant qui s’est installé dans nos vies. Pas simple à gérer, on apprend les rouages d’une entreprise installée en Chine, les bons comme les moins bons aspects. La difficulté n’est pas uniquement dans la barrière de la langue. Les logiques et pratiques sont différentes. Point. Il faut les intégrer et ça n’est pas une mince affaire.

Mais nous apprenons, nous évoluons. Nos « copains-collègues-voisins » forment une belle équipe. Un matelas pour se reposer, une soupape pour évacuer.

On fête Noel ensemble quand rien ici ne nous rappelle que nous sommes en décembre, on célèbre des arrivées et des départsou simplement on prend du bon temps « à la bonne franquette ». Euh, il nous reste quelques pommes de terre, ça vous dit un curry ? 

Dans cette Chine, loin des laowai de la ville, on se satisfait de peu. On prend ce qu’il y a à prendre. Nos habitudes s’installent vite. Avec la vendeuses de baozi du matin, qui parle plus lentement pour qu’on la comprenne, le boulanger-ambulant qu’on retrouve parfois à la sortie de l’usine,le vendeur de pastèque, notre épicerie du coin qui nous remplit nos galons d’eau et notre bouteille de gaz, le petit étale de rue et ses salades de « trucs » épicés.
Il y a la piscine géante et bordée de palmiers qu’on a découvert il n’y a pas si longtemps et qui nous voit très régulièrement maintenant. Et les restos du quotidien donc, qu’on prend toujours autant de plaisirs à découvrir.
Les nouilles muslim du QingHai, les soupes épicées de Chongching, et les mets délicieux et innombrables du Dongbei, Guangdong, Fujian,… tant de régions aux spécialités culinaires variées et développées.

Voilà.

C’est un quotidien simple qu’on essaye de partager et raconter.
Ces premiers mois passés ont été faits de découvertes, d’étonnements, de déceptions, de difficultés, d’agacements, de fiertés, de plaisirs simples et de joies.

C’est notre vie chinoise.
Quelques croquis, plus rares, mais pour continuer à se rappeler encore un peu. Des photos et du blog pour encore partager.

Enfin, nombre d’entre vous savent déjà que le début d’année 2017 a été difficile pour Marion. Pour Brice aussi.
Ce post s’inscrit comme une nouvelle étape dans la poursuite de cette aventure.
Et simplement (mais pas si simplement finalement) dans la lourde acceptation de profiter, vivre, respirer et avancer.
Alors, on va continuer de faire tout ça.
Et tout ira bien.

Tonton Gilles, on va vadrouiller encore.
Papa, étuéoulà ?

15 thoughts on “Faguo-ren à Huaguo

  1. Pour une bonne nouvelle, c’est une bonne nouvelle avec en plus un croquis de Marion.
    Continuer ca nous fait du bien même, si les dernières lignes……….
    Je vous embrasse fort

  2. Ho ! Les Bourlingots !!
    J’ai trop plaisir à vous retrouver les copains, la vraie surprise du jour.
    C’est trop dommage que j’ai pas pu venir vous voir ce coup ci (en plus j’aurais été dans le post !) mais vous m’avez trop motivé pour venir vous voir très très bientôt.
    Content de voir vos têtes et d’avoir de vos nouvelles
    Bisous
    Kazou

  3. Ahhhh!!!!

    Quand Kazou a annoncé Bourlingue, je me suis dit : cool, je me le garde pour demain dans le rer.
    Puis ce soir, avant de me coucher, je me suis dit, allez, je jette juste un oeil sur les premières lignes… pour voir comment ils peuvent commencer a écrire ce post après une si longue absence…
    Et puis voilà où j’en suis 20 min plus tard!!! C’est ca la Bourlingue pour les lecteurs (vous ne pouvez pas comprendre). On se laisse finalement happer et on termine tout d’un coup sans pouvoir se retenir…

    Merci.

    C’est bien beau par chez vous je trouve.
    J’aimerais bien venir vous voir vous savez…

    Comme dirait une personne que je ne connais pas mais qui comme moi est fan de votre blog et a toujours un commentaire sympa et bienveillant :
    Faisez gaffe

  4. trop contente de vous relire et d’être à nouveau spectateur de votre vie, comme tu le dis si bien Marion, on avance…..
    des milliers de doux bisous
    Carine

  5. Hola les amiiiis.
    Trop fort le Lundi bourlingue ! Ca fait plaisiiiiiir !!! Une grande kiffance … Comment dit on kiffance en cantonnais ?
    Bien que plus posé, j’irai même jusqu’à dire plus sédentaire, on reconnait bien le gang nam style 🙂
    On a toujours autant envie de vous suivre et vivre tout ça avec vs 🙂

    Maintenant les choses sérieuses. C’est quoi ces chaussures d’escalades Rionmar ? Tu représentes une multinationale de la grimpe quand mm… Tu travailles pas chez Petit Bateau 🙂

    Brice toujours aussi hypster, rien à dire. Les chinois imberbes doivent être trop jaloux de ta crinière !

    Gros bisous

    Keep kiffing

  6. Ce site est magnifique ! Merci de le faire exister afin que nous puissions savourer vos découvertes et les partager !
    Vos choix ne sont pas toujours faciles, mais vous savez en tirer l’essentiel. La plupart des photos sont des oeuvres d’arts. La vie est faite de rebondissements. Je pense à vous très fort, et vous embrasse tout autant. Pascale VS

  7. Bonjour,

    Cécile Subra m’a donné votre adresse-blog. Je vais en Chine à partir du 6 août prochain. Je cherche des chanteurs amateurs d’opéra et des troupes pour une recherche personnelle. J’ai vu que vous vous trouvez dans le sud (vers Shenzhen) . Merci à vous si vous en connaissez et à bientôt j’espère.
    Bonne journée,

    Georges.

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