Yangshuo-ssures d’escalade

Nouvel An arrive. Oui oui, on rattrape doucement notre retard.
On parle bien de la nouvelle année 2017…

En Chine, le passage à la nouvelle année du calendrier grégorien (adopté en Chine seulement sous Mao) n’a que peu d’importance et la Saint Sylvestre n’est guère célébrée.
Le vrai Nouvel An, celui qui compte ici, est avant tout celui du calendrier chinois.

Aparté culture #1
Le Nouvel An chinois marque le début de la Fête du Printemps qui se déroule sur quinze jours et s’achève avec la Fête des Lanternes.
Le calendrier chinois étant un calendrier luni-solaire, la date du Nouvel An chinois dans le calendrier grégorien varie d’une année sur l’autre, mais tombe toujours entre le 21 janvier et le 19 février, lors de la deuxième nouvelle lune depuis le solstice d’hiver, quand le soleil se trouve dans le signe du Verseau.
Vous avez suivi ?
Aparté culture #2
Aussi, et plutôt par tradition, les bébés, à la naissance, ont 1 an. L’âge de l’enfant sera ainsi incrémenté de 1 à chaque nouvelle année lunaire, et non à la date de naissance, comme dans nos cultures.
Mais cette tradition tend toutefois à disparaître.
Aparté culture #3
Il n’en demeure pas moins que lorsque nous demandons à nos collègues leur âge – ou celui de leur enfant, ils peinent à nous répondre, tentant de « traduire » le décompte lunaire en grégorien.

Voilà.
Il n’y a donc bien entendu pas eu de vacances pour ces fêtes de fin d’année.
Ce Nouvel An « grégorien » est tout de fois chômé, mais rien ne laisse transparaitre que 2016 touche à sa fin.
Tout comme la célébration de Noël dont nous réalisons l’échéance proche seulement une semaine avant, lors d’une escapade à Hong-Kong.
En effet, le climat est doux, et les références à cette fête occidentale font défaut.
Pas besoin de souligner là encore, que cette fête n’a aucune signification pour les autochtones.

Nous avons tout de même festoyé un tantinet. Autour d’un bon repas agrémenté de copieuses préparations chinoises, italiennes et françaises, d’un sapin en plastique, de flocons de neige collés aux carreaux et d’innombrables guirlandes électriques. Et c’est ainsi qu’il fut décidé de partir le week-end suivant, celui de Nouvel An, à Yangshuo, ville et région célèbres pour ces imposantes montagnes karstiques : ces pains de sucre qui se succèdent à l’infini dans des paysages dignes des plus belles estampes chinoises.


Nous partons à 8 (les mêmes copains/collègues) en mini-van avec chauffeur (le luxe!) pour un week-end d’escalade. Le voilà notre grand baptême.

Alessandro, qui est le plus expérimenté de tous, nous briefe.
On emprunte du matériel à l’usine, on charge nos sacs et hop, c’est parti pour 8h de route.

La pote d’une amie de la collègue du collègue du pote… nous loue des chambres dans une coloc’. Nous logerons donc dans cet appartement, coincés aux pieds des montagnes.
Nous arrivons dans la nuit (et le froid !) et c’est émerveillés que nous découvrons au réveil ces pics majestueux qui nous surplombent.

La ville de Yangshuo est située dans une étroite plaine qui sinue autour de ces pains rocheux.
C’est dorénavant un haut lieu du tourisme local et international. Les grimpeurs du monde entier s’y retrouvent. Mais la région est aussi riche de grottes à traverser, de rivières à descendre, de chemins de randonnée à arpenter. Bref de la nature, pour tout le monde.
En cette période de fin d’année, autant dire que nous ne sommes pas les seuls. Cependant notre fine équipe trouve ses marques.

Après un petit dej’ copieux pour nous donner tout un tas de bonnes forces, et équipés de nos harnais, chaussures et mousquetons, nous suivons Ale vers le spot d’escalade de la journée.HeMingGuo, notre chauffeur, nous dépose au pied du mur. Cachés derrière une forêt de bambou, au bord d’un étang partiellement asséché, c’est ici que nous entreprenons, avec plus ou moins de facilité et de grâce, de grimper les quelques routes qui s’offrent à nous. On s’élance, rapidement en premier lieu, puis très vite, il nous faut réfléchir. Car on ne fait pas les malins. C’est tout de même très vite très haut.
Ale s’improvise coach, il nous conseille, on s’entraide, et ensemble on cherche la meilleure route. On essaye, on tombe, on apprend, et on remonte.
Grimper à flanc de montagne, même harnaché et assuré, ça paraît simple sur le plancher des vaches, mais ça se corse vite dès qu’il faut trouver une prise assez large pour son pied, avec assez de relief pour y caler ses doigts. Vient alors le moment où, les muscles tremblants, on se retrouve bloqué cherchant à tâtons la prise à laquelle s’agripper du bout des phalanges.
La seule solution est de se contorsionner pour passer au creux des failles, la joue contre la surface minérale. Une fois le haut de la ligne atteint, et la cime des arbres dépassée, on profite de la vue sur ce paysage si particulier.
Une récompense méritée pour les apprentis grimpeurs du groupe, mais de courte durée tant nos muscles sont fébriles. On se laisse alors choir, offrant notre destin à notre belayer, resté au pied du mur tandis qu’assis dans notre harnais, les membres relâchés, nous pendons nonchalamment de droite à gauche, mais fiers d’avoir vaincu nos peurs.On peut enfin retirer nos chaussons d’escalade. Leur taille constamment trop petite nous a fait perdre une ou deux pointures.
On étire ses orteils en éventail, on observe ses mains cloquées… et on y retourne.

Après quelques heures, nos muscles n’en peuvent plus. Je ne savais pas que mon muscle de la phalange de l’index pouvait être courbatu…

Ce soir c’est le réveillon.Nous dinons dans un resto de la rue touristique, table tournante, canard suspendu et autres spécialités locales.On picole on rigole, et on termine la soirée dans un bar, après le traditionnel décompte précédent la nouvelle année.

Au matin, ce sont les yeux mi-clos que nous partons pour une longue journée de rando’ le long de la rivière. Après tout, l’environnement est merveilleux, on a fait 800km, il faut en profiter.
Nous avions étudié le plan et repéré le chemin qui va bien.
Cet itinéraire nous avait été conseillé, loin des sentiers battus, traversant petits villages authentiques et avec un peu de chance on pourrait même apercevoir des pêcheurs aux cormorans.

Bon ça, c’était avant.
Avant qu’un parking ne soit construit pour y garer les bus, que la rue principale du petit village ne soit bétonnée de part et d’autre, que les veilles maisons ne soient (en cours d’être) reconstruites à l’identique mais en « mieux », et qu’une immense porte annonce l’arrivée imminente d’une billetterie !
Bien évidemment les traditionnels radeaux en bambou des pêcheurs ont été remplacés par leurs homonymes touristiques en tubes PVC bleus.
Ben oui, ça aurait été dommage de les peindre pour faire semblant…
Le radeleur – celui qui conduit les radeaux – dirige désormais une embarcation au moteur pétaradant, qui fait fuir poissons et cormorans…Une fois n’est pas coutume, nous sommes attristes et déçus de ces brusques changements. Pour le paysage mais aussi pour les locaux. De petites mamies essayent vainement de vendre quelque artisanat.
Et la pêche ? et ces pêcheurs ? que deviennent –ils ?
Et puis, nous sommes également extrêmement agacés lorsque la gentille dame nous empêche d’emprunter le chemin public qui longe la rive sans prendre de tickets alors que nous, nous voulons pas de « tour en bateau ».
Pas le choix. Comment aurait-il pu en être autrement ?

Tant pis, cette fois-ci, la Chine nous a vaincu.
On ne se laisse pas abattre pour autant.
Après quelques minutes d’amertume partagées, notre équipe bougonne rebrousse chemin, et HeMingGuo nous dépose quelques kilomètres plus loin pour rejoindre le chemin en aval.Le sentier longe la tranquille rivière entre bambou et végétation dense, pavés et potagers. Il serpente le long des berges et de leur grève caillouteuse. Les montagnes sont impressionnantes. Leurs formes coniques invitent à la rêverie. On se raconte la géologie et on s’oublie dans ce décor magique et majestueux.
Heureusement que les détonations des moteurs nous sortent de nos songes d’estampe.

Nous profitons tout de même de ce cadre superbe. C’est beau.
La fine pluie dépose une légère brume sur le décor. Les nuages s’accrochent, s’étirent et gomment les sommets. Les couleurs s’effacent pour créer un camaïeu profond de bleu, vert et marron.
Nous évoluons dans un tableau. Et on se réjouit en apprenant que nous sommes en basse saison.
Lors de la haute saison, le flot des tonitruants esquifs en PVC doit être continu ! On termine notre balade… sur les rotules. Pas facile ce début d’année.

Dernier jour de ce week-end prolongé, et nous rejoignons « Moon Hill » pour une matinée d’escalade.Ce sont les bras encore ankylosés de notre première journée, que nous nous essayons à ce fameux site de grimpe. L’arche béante magnifie la vue incroyable sur la vallée.Bien évidemment, si nous sommes épatés par l’aisance d’Ale à grimper ces faces dénuées de prises, nous n’arriverons pas à la moitié.

Trop pentu, trop long, trop dur, trop fatigués…
Il va falloir le muscler ce nouveau muscle de la phalange !

新年快乐 – Xin Nian Kuai Le – Bonne Année – 

6 thoughts on “Yangshuo-ssures d’escalade

  1. Magnifique même si on sent de la tristesse devant « l,aménagement touristique du lieu »
    Et vous voir souriant et heureux réchauffe le coeur

  2. Bien que plus « civilisé », ce nouveau post de la bourlingue est tout aussi chatoyant !
    Les paysages sont magnifiques, et les photos du deuxième site d’escalade donne le vertige rien que de les regarder…

    Par contre vous n’avez pas dit qui a gagné au ricochet 🙂

    Big bisous ! Et bienvenus en 2017, selon mon calendrier (Gregorien, hahahahahahhahahahahaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa_ fratern’s !! )

Ça vous inspire?